Les autres philosophes | Philosophie pour enfants ou adultes: Vivre

Vivre

La vraie vie

Projet territorial d'Éducation Artistique et Culturelle 2024–2029 consacré au vivant en collaboration avec la Médiathèque entre Dore et Allier de Lezoux, Cyril Amblard, la Compagnie Entre eux deux rives et Graine Vagabonde, avec le soutien de la Direction Régionale des Affaires Culturelles Auvergne, la Région Auvergne-Rhône-Alpes, et le Département du Puy-de-Dôme.
Début du projet : quatrième trimestre 2024
Représentations du spectacle Dépêche-toi ! par la Compagnie Entre eux deux rives, les mardi 5 et jeudi 7 novembre, accueil de deux classes de maternelles et deux classes d'élèves de CE1/CE2.
Les séances pré-spectacles ont lieu le lundi 4 novembre 2024, de 9h à 10h à Seychalles, de 10h45 à 11h45 à Lezoux, et de 14h à 16h30 à Orléat.
Les premiers ateliers ont lieu le vendredi 8 novembre 2024, de 8h30 à midi à Orléat, de 14h à 15h à Lezoux, et de 15h30 à 16h30 à Seychalles.
Ateliers questionnement philosophique et écriture musicale avec les élèves de CM1–CM2 de Claire Rouby à l'école de Joze, du 13 au 27 mars 2025.

Conférences philosophiques
Samedi 9 novembre 2024, 17h30 – 19h
La philosophie comme manière de vivre :
La vraie vie
Samedi 7 décembre 2024, 17h30 – 19h
Les deux sens de la vie :
dans la philosophie d'Henri Bergson
Samedi 15 février 2025, 17h30 – 19h
La découverte vivante du corps charnel et du monde-de-la-vie
Ateliers philosophie adultes
Mercredi 22 janvier 2025, 17h30 – 19h
Les deux sens de la vie :
dans la philosophie d'Henri Bergson
Mercredi 5 mars 2025, 17h30 – 19h
La découverte vivante du corps charnel et du monde-de-la-vie
Argumentaire

La philosophie comme manière de vivre
La vraie vie
Nicolas Poussin, Diogène jetant son écuelle (détail), Paris, Musée du Louvre. « Vainqueur de l’ennemi le plus redoutable de l’homme, la volupté », celui qui « faisoit pleuvoir le sel & l’ironie sur les vicieux », « accablant les passants de vérités injurieuses », « ils apprirent de lui à pratiquer la vertu, à manger des oignons, à marcher les pieds nus, à n’avoir besoin de rien, & à se moquer de tout. […] Personne n’eut plus de fierté dans l’âme, ni de courage dans l’esprit, que ce philosophe. Il s’éleva au-dessus de tout événement, mit sous ses pieds toutes les terreurs, & se joua indistinctement de toutes les folies. » Diderot, L'Encyclopédie, article Cynique

avoir l'audace d'accomplir en soi la loi de la philosophie, vivre de manière philosophique

Friedrich Nietzsche, La Philosophie à l'époque tragique des Grecs

La vraie vie (ἀληθὴς βίος)
Les quatre sens du vrai
dans la vie philosophique (βίος φιλοσοφικός) antique
Est vrai ce dont l'être n'est pas en retrait, caché, dissimulé, négligé, oublié. Est vrai ce dont l'être n'est pas altéré par un élément qui soit autre que lui-même, ce qui est conforme à son essence, intègre, libre, non asservi, affranchi, original, authentique Est vrai ce qui est droit. Droiture, rectitude de la vie. Vie conforme au λόγος et à la φύσις. Est vrai ce qui est, au sens propre, c'est-à-dire bon, immuable, incorruptible, éternel, en particulier irréfutable, anelegktos.
La vie socratique (βίος σωκρατικὸς)
Le souci de soi-même (ἐπιμέλεια ἑαυτοῠ), examen de soi-même, exetasis, mise en question vivante (dévoilement) de la bonté de son âme et de sa vie. Le dernier mot de Socrate, μὴ άμελήσητε, ne négligez pas, n'oubliez pas. Le courage de la vérité (la παρρησία), envers soi-même et les autres. Savoir ne pas savoir.
l'εἰρωνεία, miroir
La question de l'essence (οὐσία) elle-même. La question essentielle : Qu’est-ce ? (τί ἐστι), question simplissime, l'essence du questionnement est la mise en question de soi-même, son εἰρωνεία. Devenir soi-même pour soi-même la question. Socrate est la question, elle-même, la dialectique. Savoir ne pas savoir. Le dialogue vivant est l'essence du λόγος, de la vie philosophique, et de l'être lui-même. Mise en question de sa manière de vivre et vie répondant d'elle-même, de sa conformité à la raison (λόγος).
l'εἰρωνεία
Vie en quête du bien et du sens de l'être.
Pratique socratique de la réfutation logique du faux par soi-même, l'ἔλεγχος, dont le principe vivant est la non contradiction avec soi-même.
Recherche et pratique des vertus (ἀρετή), du meilleur, du bien, du perfectionnement moral, et de l'idéal.
Vie philosophique comme mission irrévocable.
La vie cynique (βίος κυνικός)
vie non honteuse, effrontée, impudente (ἀναίδεια), audace de vivre, vie bravant le faux. Le courage de la vérité (la parrêsia) vie dépouillée (πενία), indifférente (ἀδιάφορος), vie de détachement, renoncement aux artifices inutiles, vie frugale, vie nue et culottée, vie simple. Rien de trop (Μηδὲν ἄγαν), modération (σωφροσύνη)
vraie vie royale, souveraine (face-à-face Diogène Alexandre)
vie non-conformiste (παραχαράττειν τὸ νόμισμα), non conventionnelle, discréditation vivante de la fausseté des conventions, manifestant que la vie ordinaire est (erre) ailleurs que là où est la vraie vie, le droit chemin, vie sauvage, nature, rebelle, insolente, vie critique (diakritikos), interpellante, provocante, dérangeante.
conformité charnelle, incarnée, à la vérité, à même son corps
un raccourci vers la vertu (σύντομον ἐπ᾽ ἀρετὴν ὁδόν)
vie de chien de garde (phulaktikos), décriant et tournant les vices en ridicule, mordant, diatribes (διατριβαί), harangue
force d'âme (καρτερία, ἰσχύς), exercice, ascèce spirituelle et corporelle (ἄσκησις), efforts (πόνοι) sur soi-même
Diogène et sa lanterne, Jean-Léon Gérôme, 1860.

La vie stoïcienne
... Ne pas surajouter de jugements aux événements Vivre selon la vertu (SVF I, 179, 180) ...

Lectures philosophiques
Platon, Dialogues socratiques
Les Stoïciens, Œuvres
Diogène Laërce, Vies et doctrines des philosophes illustres
Léonce Paquet, Les Cyniques grecs : Fragments et témoignages
Denis Diderot, L'Encyclopédie, article Cynique
Friedrich Nietzsche, Schopenhauer éducateur
Émile Boutroux, Socrate, fondateur de la science morale
Léon Robin, La morale antique
André Jean Festugière, Socrate
Id., Contemplation et vie contemplative selon Platon
René Schaerer, Le mécanisme de l’ironie dans ses rapports avec la dialectique
Jan Patočka, Socrate
George Rudebusch, Les trois vies philosophiques de Socrate
Georges Dumézil, Divertissement sur les dernières paroles de Socrate
Michel Foucault, Le courage de la vérité, Cours au Collège de France. 1984
Marie-Odile Goulet-Cazé, L'ascèse cynique
Id., Le cynisme, une philosophie antique
Isabelle Chouinard, Un tonneau sous le Portique : la réception du cynisme chez les stoïciens
Id., Cynisme et falsification du langage : à propos de Diogène cherchant un homme
Id., Les maîtres de Cratès

Pierre Hadot, Exercices spirituels et philosophie antique
Id., La Philosophie comme manière de vivre
Id., La philosophie comme éducation des adultes
Id., Introduction aux Pensées de Marc-Aurèle
Id., Qu'est-ce que la philosophie antique ?
Id., Éloge de Socrate
Id., Éloge de la philosophie antique
Id. et Ilsetraut Hadot, Apprendre à philosopher dans l'Antiquité. L'enseignement du manuel d'Épictète et son commentaire néoplatonicien
Ilsetraut Hadot, Sénèque : Direction spirituelle et pratique de la philosophie
Id., Wittgenstein et les limites du langage
Théodore Colardeau, Étude sur Épictète
Maël Goarzin, Comment vivre au quotidien ? Carnet de recherche en ligne


La philosophie comme manière de vivre
Les deux sens de la vie

dans la philosophie d'Henri Bergson

Qu'est-ce que le temps ?
La première découverte philosophique bergsonienne :
Le temps est le contraire de ce que l'intelligence pense qu'il est
LE « TEMPS » (t) : L'HEURE, LA DATE LA DURÉE VIVANTE
mixte
confus
d'espace (ligne, cercle, plan) et de durée (dénaturée, faussée)
pure
claire et distincte
artificiel, symbolique, standard réelle, vraie, originale
inerte, calculé, dé/compté, mesuré,
mathématiquement, mécaniquement, économiquement,
de l'extérieur
vivante et vécue, sensible et sentie,
vitalement, charnellement, intimement,
de l'intérieur
analytique,
intelligence

part de l'immobile et reconstruit le mouvement avec des immobilités juxtaposées,
faite pour l'action, l'utilité pratique
intuitive,
intuition

pense en durée, part du mouvant,
sympathie spirituelle avec le vivant et la vie des choses,
consiste à défaire ce que l'intelligence a fait
fabrication,
mécanique,
procède par association et addition de matériaux,
concentration et compression,
centripète (de la périphérie au centre),
synthétique,
successif (confusion de la succession avec un déplacement)
la matière est pensée et traitée par l'intelligence comme une composante
organisation,
organique,
se développe par dissociation et dédoublement,
explosive,
centrifuge (du centre à la périphérie),
simple,
simultanée
la chair vivante et la matière est un obstacle traversé, une résistance à l'organisation vivante
relatif absolue
divisé et arbitrairement divisible indivise, totale et rebelle aux divisions arbitraires
homogène,
fait de parties identiques
et extérieures les unes aux autres,
multiplicité numérique de juxtaposition dans l'espace
hétérogène,
se différençiant de soi,
en différences intérieures les unes aux autres,
multiplicité qualitative de compénétration dans la durée
tout fait, prédéterminé, programmé d'avance,
prévisible
se faisant,
imprévisible
asservi libre
social, impersonnel,
normé
individuelle, personnelle,
sauvage (vie végétale et vie animale)
oubli et contresens sur le sens et la nature du temps :
passager, temporaire, éphémère, disparition,
anéantissement
;

confusion entre conservation, temporelle,
et inclusion, spatiale, « d'images dans un organe »;

oubli et contresens sur la nature (« cérébrale ou psychique »,
« mécanisme ou faculté ») et le sens (« enregistrer le passé ») de la mémoire vivante et du passé
remémoration et expérience vivante de la durée,
telle qu'elle est, vécue,
conformément à sa vraie nature et son vrai sens :
continuation, croissance, mûrissement, mémoire,
création, accroissement d'être


la durée, elle-même, est mémoire
le passé, lui-même, se conserve

Dénouée du suprasensible, la métaphysique devait-elle simplement disparaître, et sa disparition n'allait-elle pas entraîner celle de la philosophie elle-même […] ? Il y a eu plusieurs tentatives de sauver la métaphysique et le destin métaphysique de la philosophie de sa critique empiriste [britannique]. Celle qui nous intéresse dans ce livre […] a proposé un programme inédit de nouage entre l'expérience et la métaphysique, qui explique une partie importante de la philosophie du XXᵉ siècle, notamment en France [Henri Bergson, Jean Wahl, Maurice Merleau-Ponty, Gilles Deleuze, Pierre Hadot d'une part, Georges Bataille, Maurice Blanchot, Michel Foucault d'autre part], et qui continue d'inspirer bien des penseurs actuels. […] Car, d'après les empiristes métaphysiques, le plan des expériences n'est pas plat. Toutes les expériences ne se valent pas. Les expériences ordinaires […] nous empêcheraient de saisir le fond des choses, le sens véritable de la vie, la nature ultime de la réalité. Dans nos expériences ordinaires, nous raterions quelque chose d'essentiel, mais il nous serait donné dans de rares moments privilégiés qui sont d'authentiques expériences métaphysiques. […] Les expériences ordinaires nous maintiendraient dans un régime d'apparence sur le plan épistémique et dans le conformisme des valeurs établies sur le plan moral, mais les expériences exceptionnelles nous donneraient accès à la réalité véritable et nous indiqueraient un mode d'existence supérieur et essentiellement libre.

Stéphane Madelrieux, Philosophie des expériences radicales, p. 14

Lectures philosophiques
Henri Bergson, Essai sur les données immédiates de la conscience
Id., Matière et mémoire
Id., L'évolution créatrice
Id., La pensée et le mouvant
Id., Introduction à la métaphysique
Id., La conscience et la vie
Id., L'âme et le corps
Id., Le possible et le réel
Id., Cours à l’ENS, 1898-1900 (à paraître en 2025)
Id., L’idée de temps. Cours au Collège de France 1901-1902
Id., Histoire de l’idée de temps. Cours au Collège de France 1902-03
Id., Histoire des théories de la mémoire. Cours au Collège de France 1903-1904
Id., L’évolution du problème de la liberté. Cours au Collège de France 1904-1905

Maurice Merleau-Ponty, Bergson se faisant
Vladimir Jankélévitch, Henri Bergson
Gilles Deleuze, Bergson, 1859–1941
Id., La conception de la différence chez Bergson, repris dans L'île déserte et autres textes (1953–1974)
Le bergsonisme
Giuseppe Bianco, Après Bergson : Portrait de groupe avec philosophe
Frédéric Worms, Bergson ou les deux sens de la vie
Stéphane Madelrieux, Philosophie des expériences radicales
André Pichot, Histoire de la notion de vie
Aurélien Arnaud, Terminator 2 Unplugged


La philosophie comme manière de vivre
La découverte vivante du corps charnel et du monde-de-la-vie
À partir des sciences physiques s'étendit à la conception de toute existence une ontologie dont l'entité modèle est la pure matière, dépouillée de tous les traits de la vie. […] Notre pensée est aujourd'hui sous la domination ontologique de la mort. […]
Son œuvre accomplie, le dualisme nous a légué l'« étendue » en tant que ce qui est sans vie et insensible, et le corps est indéniablement une partie de cette étendue : dès lors, soit il est essentiellement le même que l'étendue en général — auquel cas on ne comprend pas son être en vie, soit il est sui generis — auquel cas on ne comprendra pas sa prétendue exception et elle remet en question tout le principe, c'est-à-dire l'interprétation matérialiste de la substance comme telle selon les pures propriétés de l'étendue indifférente. […]
Ainsi le corps organique signifie-t-il la crise de toute ontologie connue et de « toute ontologie future qui pourra se présenter comme science ». […] Le corps vivant est le rappel de la question ontologique non encore résolue : « qu'est-ce que l'être ? » et doit être le canon des tentatives à venir pour la résoudre.

Hans Jonas, Le phénomène de la vie. Vers une biologie philosophique,
La vie, la mort et le corps dans la théorie de l'être

Mais il est à présent capital de considérer la substitution qui s’accomplit déjà chez Galilée – par laquelle le monde mathématique des idéalités, qui est une substruction, est pris pour le seul monde réel, celui qui nous est donné vraiment comme perceptible, le monde de l’expérience réelle ou possible : bref, notre monde-de-la-vie quotidien. Cette substitution s’est transmise aussitôt chez les successeurs de Galilée, chez tous les physiciens des siècles suivants. […] Ainsi dès Galilée commence la substitution d’une nature idéalisée à la nature pré-scientifique donnée dans l’intuition. […]
C’est dans le monde-de-la-vie que nous-mêmes vivons, conformément à notre mode d’être, c’est-à-dire dans toute la chair de notre personne. Mais ici nous ne trouvons rien des idéalités géométriques, ni l’espace géométrique, ni le temps mathématique avec toutes ses formes.
C’est là une remarque importante, bien que fort triviale. Car c’est précisément cette trivialité qui est masquée par la science exacte (et ce depuis la géométrie antique déjà) – masquée, donc, par cette substitution d’une activité méthodiquement idéalisante à ce qui est donné immédiatement comme la réalité (que présuppose toute idéalisation), et donné avec une force, une persistance, une vérité, dont la nature est unique et insurmontable. […] Ainsi dans la mathématisation géométrique et physique ajoutons-nous au monde de la vie – à celui qui dans notre vivre-au-monde concret est toujours pour nous donné comme réel – un vêtement d’idées, celui des vérités qu’on appelle « objectivement scientifiques » ; […] Le vêtement d’idées : « Mathématique et science mathématique de la nature », ou encore le vêtement de symboles, de théories mathématico-symboliques, comprend tout ce qui, pour les savants et les hommes cultivés, se substitue (en tant que nature « objectivement réelle et vraie ») au monde de la vie et le travestit. C’est le vêtement d’idées qui fait que nous prenons pour l’Être vrai ce qui est Méthode.

Edmund Husserl, La crise des sciences européennes et la phénoménologie transcendantale,
§ 9 La mathématisation galiléenne de la nature. h) Le monde-de-la-vie comme le fondement de sens oublié
de la science de la nature
, p. 57-60

Le vivant est l'être charnel. Qu'est-ce que la chair et le charnel ? Qu'est-ce que le sensible et la sensibilité ?
Les deux sens du corps. 2) Le concept naïf de corps comme objet ou chose matérielle étendue. Aporie (perception et vie). Confusion entre essence et corps. 1) Le corps vécu : chair vivante et sensible, au double sens. Vie charnelle, incorporation, sensibilité, sentiments.


Lectures philosophiques
Edmund Husserl, La crise des sciences européennes et la phénoménologie transcendantale
Maurice Merleau-Ponty, Phénoménologie de la perception
Id., Le visible et l'invisible
Jan Patočka, Introduction à la phénoménologie de Husserl
Id., Qu'est-ce que la phénoménologie ?
Alphonse de Waelhens, La Phénoménologie du corps
Hans Jonas, Le phénomène de la vie : Vers une biologie philosophique
Michel Foucault, La vie : l'expérience et la science

Barbara Stiegler, Nietzsche et la critique de la chair : Dionysos, Ariane, le Christ
Monique Dixsaut, Nietzsche. Par-delà les antinomies
Pierre Montebello, Vie et maladie chez Nietzsche
Gilles Deleuze, Nietzsche et la philosophie
Id., Nietzsche
Didier Frank, Nietzsche et l'ombre de Dieu
Stefan Zweig, Nietzsche
Sebastian Schütze, Friedrich Nietzsche et les artistes du nouveau Weimar
Benjamin Lipscomb, The Women Are Up to Something: How Elizabeth Anscombe, Philippa Foot, Mary Midgley and Iris Murdoch Revolutionized Ethics
Clare Mac Cumhaill et Rachael Wiseman, Le Quartet d'Oxford. Quand Elizabeth Anscombe, Philippa Foot, Mary Midgley et Iris Murdoch réinventaient la philosophie


Penser, un arbre
L'Arbre de Porphyre
Comment la pensée est-elle vivante ? Comment la pensée s'engendre-t-elle ? Comment naît-elle et grandit-elle ?
Quel est l'engendrement vivant, logique, de la question — Qu'est-ce ? — et de la réponse ?
Comment l'arbre de la pensée s'engendre-t-il ? Dans quel sens logique ? Comment ses branches se divisent-elles ? Comment, et pourquoi, s'élève-t-il ? Jusqu'où ?
Le logique serait-il vivant ? Serait-il l'âme de la pensée ? Et le logique, l'âme du vivant ?

S'élever
L'ascension spirituelle

Élévation et ascension des trois degrés ou espèces de connaissance
selon Augustin d'Hippone
« de l'extérieur à l'intérieur, de l'inférieur au supérieur »
Connaissance intellectuelle
par l'intellect (νοῦς, intellectus, intelligentia)
de l'esprit
de la lumière intelligible de la vérité
Connaissance rationnelle et spirituelle
par le dialogue de l'esprit (mens ou spiritus)
avec la raison (λόγος, ratio)
à la lumière intelligible de la vérité
Connaissance sensible
par les sens ou l'imagination
de l'âme (anima, animus)
à la lumière sensible du soleil


L'Arbre de Porphyre : quatre problèmes philosophiques médiévaux
Problème métaphysique de l'essence : Idées (Platon) ou sujet-substrat, ὑποκείμενον (Aristote). Problème de la hiérarchie substance "première"/substance "seconde".
Problème de l'un et du multiple. Problème de l'universel et du particulier, deux sortes d'essences, deux sortes d'accidents.
"Querelle des universaux".
À partir du XIᵉ s. (Roscelin de Compiègne) et des écoles philosophiques parisiennes du XIIᵉ s. (Guillaume de Champeaux, Pierre Abélard, Albéric de Paris, Robert de Melun, Adam de Balsham, Gilbert de Poitiers). Premier commencement médiéval de la métaphysique.
Réfutation par Abélard de la théorie du sujet unique de l'universel et du particulier (Boèce).
En creux, l'autre sens de l'être, absent de l'arbre de Porphyre : l'existence. Problème métaphysique de la distinction de l'être (existence) et de l'essence de l'étant. "Accidentalité de l'être", "indifférence de l'essence". À partir d'Avicenne, puis Questions disputées du XIIIᵉ siècle à Paris (Henri de Gand, Gilles de Rome, Godefroid de Fontaines, Thomas d'Aquin). Second commencement médiéval de la métaphysique. Problème métaphysique de la polysémie de l'être : analogie ou univocité de l'être ?
Laurus metaphysica (détail), estampe du XVIIᵉ siècle, de Léonard Gaultier, BnF.
Réconciliation de Jean Duns Scot et de Thomas d’Aquin par Avicenne.
En contrebas, à gauche, les partisans de l’univocité de l’être : Bonaventure, Alexandre de Hales, Guillaume d’Ockham et François de Meyronnes.
À droite, ceux de l’analogie de l’être : Henri de Gand, Cajétan (Thomas de Vio), Francisco Suárez, Gilles de Rome et Roger Bacon.


Vitalité ; verticalité ; croissance, organisation, ramification, cohésion, circulation et hiérarchie des savoirs ; stabilité, robustesse (face à la fortune) ; solidité, enracinement, fondation, fondements

L'Arbre cartésien de la Philosophie
Changement de sens (signification, orientation et sensibilité) de la "métaphysique", et philosophie première
"Métaphysique", au sens pré-cartésien (d'origine aristotélicienne) : science (non restreinte) supra-physique et supra-mathématique du supra-naturel ou sur-naturel, c'est-à-dire science de Dieu, de l'âme et de l'être (et des transcendantaux convertibles avec l'être).
Arbre de Porphyre (Εἰσαγωγή aux Catégories d'Aristote), dont la Logique est l'âme et dont la cîme est la Métaphysique.
Sens de la vie philosophique : ascension, élévation spirituelle, correspondant à la transcendance réelle du sujet de la métaphysique à l'égard du mouvement, de la matérialité, et du temps.
"Philosophie première" (Méditations de) au sens cartésien : science des premières causes, c'est-à-dire des principes.
Arbre cartésien de la Philosophie, « dont les racines sont la Métaphysique [au nouveau sens de philosophie première ou distincte d'elle ?], le tronc est la Physique » et dont la cîme est la Morale, « j’entends la plus haute et la plus parfaite morale, qui, présupposant une entière connaissance des autres sciences, est le dernier degré de la sagesse » (Principes de la philosophie). Quelle est l'âme de l'arbre cartésien ?
Sens de la vie philosophique : approfondissement, infra-physique et infra-géométrique, de l'enracinement ou des racines philosophiques premières, et élévation morale ?
Lectures philosophiques
Aristote, Catégories, Présentation, traduction et commentaires de Frédérique Ildefonse et Jean Lallot
Alain de Libera, La Querelle des universaux. De Platon à la fin du Moyen Âge, p. 44-45
Annemicke R. Verboon, The Medieval Tree of Porphyry: An Organic Structure of Logic
Margaret Cameron, The Logic of Dead Humans: Abelard and the Transformation of the Porphyrian Tree
Boèce, La Consolation de Philosophie
Bonaventure, Itinéraire de l'esprit jusqu'en Dieu
Christian Heck, L'échelle céleste dans l'Art du Moyen Âge. Une histoire de la Quête du Ciel

Pierre Mesnard, L'arbre de la sagesse, dans Descartes, Cahiers de Royaumont (1957)
Juliette Dross, Les métamorphoses de l’arbre de la philosophie, de l’ancien stoïcisme à Descartes
Susanna Berger, The Art of Philosophy: Visual Thinking in Europe from the Late Renaissance to the Early Enlightenment


La philosophie comme manière de vivre
« Bestial » et « sauvage »

Ré-animer la pensée, l'imaginaire, et la sensibilité à l'animalité
En cours d'invention

Quand la philosophie redécouvre la sensibilité, elle atteint déjà quelque chose qui n'est plus, et pas encore, humain.

Le loup est la forêt. La forêt charnelle primordiale.
Retour à la « matière » primordiale : la forêt vivante. Conséquences vivantes.

Si les loups, Yellowstone – Si un castor, est une rivière – Les rivières volantes d'Amazonie
(ἡ) ὕλη [(hê) hulê, ou hylé]. Traduction latine : materia.
La substance [traduction latine, avec essence, du grec οὐσία] indéterminée commune aux corps : un arbre, un meuble, une canne ont pour matière commune le bois.

Hulê signifie primitivement le bois, dans tous les sens du terme : l'arbre, la forêt, le bois de chauffage ou de charpente. Les philosophes adoptèrent le mot pour désigner la matière.

Ivan Gobry, Le vocabulaire grec de la philosophie
Les choses se sont succédé dans l'ordre suivant : d'abord les forêts, puis les cabanes, les villages, les cités et enfin les académies savantes.

Giambattista Vico, La Science nouvelle

Et pourtant, il reste un mot qu'Aristote ne pouvait éviter pour parler de l'indicible : hylé. Il est le premier à lui donner son sens philosophique de matière. Oui, hylé est le mot grec pour forêt. Le dérivé de hylé en latin est silva. […] Étrange chose que les Romains aient traduit le mot aristotélicien hylé par materia, alors que la langue latine disposait d'un tel dérivé ! Mais le mot materia lui-même ne s'éloignait pas beaucoup des forêts. Materia veut dire bois – le bois utilisable dans l'arbre, par opposition à l'écorce, au fruit, à la sève, etc. Et materia a la même racine, la même racine, oui, que mater, la mère.

Robert Harrison, Forêts. Promenade dans notre imaginaire,
I. D'abord, les forêts. 3 : La déesse vierge

Revenir aux choses mêmes, c’est revenir à ce monde avant la connaissance dont la connaissance parle toujours, et à l’égard duquel toute détermination scientifique est abstraite, signitive et dépendante, comme la géographie à l’égard du paysage où nous avons d’abord appris ce que c’est qu’une forêt, une prairie ou une rivière.

Maurice Merleau-Ponty, Phénoménologie
de la perception
, p. III
Nous pistons le même territoire-loup […]. Nous remontons dans la forêt, sur de vieilles pistes forestières, […] oubliées depuis longtemps. Nous nous perdons presque, la géographie des animaux n'est pas sur la carte.

Baptiste Morizot, Manières d'être vivant.
Enquêtes sur la vie à travers nous
, p. 91

Artémis, et Actéon


Sur-vivants (ὑπερ-)
Faire corps avec : le territoire (originel, sauvage, en deçà de « l'espace »). Faire corps avec : la meute (corps multiple primitif).
Territoire d'abord sonique, sonore, acoustique. Territoire olfactif, dialogue muet et différé. Frontières d'odeurs.
Territoire charnel, aux dimensions du corps de la meute.
Quand la philosophie redécouvre la sensibilité, elle atteint déjà quelque chose qui n'est plus, et pas encore, humain.

Nous ouvrir à l'inhumain et au surhumain (des durées inférieures ou supérieures à la nôtre…), dépasser la condition humaine, tel est le sens de la philosophie, pour autant que notre condition nous condamne à vivre parmi les mixtes mal analysés, et à être nous-même un mixte mal analysé.

Gilles Deleuze, Le bergsonisme,
ch. I : L'intuition comme méthode
, p. 19
.

Présences ancestrales
Le cri (hurlement, gémissement, grognement, piaillerie, jacasserie, gazouillis,…), le chant, la danse
Langages sonores d'avant la parole, antéprédicatifs
Ça revient à dire : il y a des cris philosophiques. Chacun sait que chez les oiseaux, on distingue les cris et les chants. […] Mais je peux dire que de même dans la philosophie il y a des discours et que les discours ne sont pas la même chose que les cris, les discours c’est le chant des philosophes. C’est leur manière de chanter, et voilà qu’il y a des cris philosophiques. On risque de passer à côté, à ce moment là on se fait de la philosophie une idée d’une chose morte. On l’assimile au discours qu’elle développe, et un cri philosophique peut toujours être traduit en terme de discours. Mais voilà que quelque chose résiste et que non, si on a le moindre goût de la philosophie, on sait bien que ce sont des cris alors, et que là, la philosophie y trouve les points de sa naissance, de sa vie. Et qu’est-ce que c’est ? […] Qu’est-ce qui fait qu’un philosophe lance un cri philosophique ? Cherchons des exemples. […]
Si vous n’êtes pas sensible au cri philosophique vous n’êtes pas sensible à la philosophie. […] Si vous n’entendez pas ce que c’est que le cri des philosophes, vous ne savez pas ce que c’est que la vie, et vous ne savez pas non plus ce que c’est que la philosophie, et vous ne savez pas ce que c’est que la pensée.


La caverne originelle
L'antre et la bête comme être qui se terre
Centre du monde bestial, centre bestial du monde. Foyer d'avant le feu.


« Bestial » et « sauvage » : désir et masculin (la part maudite)
Bestial, le. adjectif.
1ère édition, 1694 : Brutal, qui tient de la bête. Un désir bestial.
2ème édition, 1817 : Un homme bestial.
9ème édition, actuelle : Des appétits bestiaux.

Dictionnaire de l'Académie Française
.


Lectures philosophiques
Hans Jonas, Le phénomène de la vie : Vers une biologie philosophique
Baptiste Morizot, Manières d'être vivant. Enquêtes sur la vie à travers nous
Id., L'inexploré
Id. et Suzanne Husky, Rendre l'eau à la Terre. Alliances dans les rivières face au chaos climatique
Mouvement d'Alliance avec le Peuple Castor
Camille de Toledo, Le fleuve qui voulait écrire. Les auditions du parlement de Loire
Henri Bosco, L'enfant et la rivière
Catherine Barr et Jenni Desmond, Quatorze loups. Une histoire de réensauvagement
National Geographic, La Revanche des loups. L'épopée des loups de Yellowstone
Antonio Donato Nobre, Il y a un fleuve au dessus de nous
Pascal Cuissot (un Film de), Le mystère des rivières volantes d'Amazonie, sur arte
Site web du Projet Rios Voadores (Rivières Volantes), initié depuis 2007 par Gérard et Margi Moss

Robert Harrison, Forêts : Promenade dans notre imaginaire
Laurent Tillon, Être un chêne : sous l'écorce de Quercus
Alexis Jenni, Parmi les arbres, essai de vie commune
Élisabeth de Fontenay, Le silence des bêtes : La philosophie à l'épreuve de l'animalité
Oliver Austin et Arthur Singer, Oiseaux
Zdeněk Veselovský, Le royaume des oiseaux
Emmanuelle Kecir-Lepetit et Léa Maupetit, Oiseaux à reconnaître
Alice Brière-Haquet et Csil, Le Corbeau d'Épictète
Vinciane Despret, Habiter en oiseau

Ubisoft Montréal, Far Cry Primal
Alain Testart, Art et religion de Chauvet à Lascaux
Julien d'Huy, Cosmogonies. La Préhistoire des mythes
Jean-Loïc Le Quellec, Avant nous le Déluge ! L'humanité et ses mythes
Id., La caverne originelle. Art, mythes et premières humanités


La philosophie comme manière de vivre
Les sentiments métaphysiques

L'étonnement (θαυμάζειν), l'ennui, l'angoisse, l'effroi, la joie,
l'amour (alêthês erôs)
La pensée
la plus profonde
aime
la vie
la plus vivante.


Friedrich Hölderlin, Socrate et Alcibiade
En fait je n'étais pas capable de formuler mon expérience, mais, après coup, je ressentais qu'elle pouvait correspondre à des questions comme : Que suis-je ? Pourquoi suis-je ici ? Qu'est-ce que c'est que ce monde dans lequel je suis ? J'éprouvais un sentiment d'étrangeté, l'étonnement et l'émerveillement d'être là. […] Je crois que je suis philosophe depuis ce temps-là, si l'on entend par philosophie cette conscience de l'existence, de l'être-au-monde. […]
Cette expérience a dominé toute ma vie. […] Depuis ce temps, j'ai ressenti très fortement l'opposition radicale qu'il y a entre la vie quotidienne, qui est vécue dans une semi-inconscience, dans laquelle les automatismes et les habitudes nous guident, sans que nous ayons conscience de notre existence et de notre existence dans le monde, entre la vie quotidienne, donc, et des états privilégiés dans lesquels nous vivons intensément et avons conscience de notre être-au-monde.

Mon expérience par excellence, je crois que le meilleur moyen de la décrire, c'est de dire que lorsque je fais cette expérience, je m'émerveille de l'existence du monde

Ludwig Wittgenstein, Conférence sur l'éthique, dans Leçons et conversations, p. 148


Lectures philosophiques
Platon, Phèdre
Id., Le banquet
Léon Robin, La théorie platonicienne de l'amour
Plutarque, Dialogue sur l'Amour
Hannah Arendt, Le concept d'amour chez Augustin
Michel Foucault, Histoire de la sexualité (La volonté de savoir, L’usage des plaisirs, Le souci de soi, Les aveux de la chair)
Id., La sexualité, Cours donné à l'Université de Clermont-Ferrand, 1964. Le discours de la sexualité, Cours donné à l'Université de Vincennes, 1969
Juliette Grégoire et Lucia Calfapietra, Les philosophes parlent d'amour
Vinciane Despret, Au bonheur des morts. Récits de ceux qui restent